• Décembre en Afrique - 1 -

     

    Dans la bananeraie, les hommes coupent à la machette le régime de fruits verts. Bientôt après avoir cueilli les fruits mûrs, ils tailleront les plants morts des bananiers. La longue fleur femelle, aux doigts raides, violets, pendra désormais desséchée.


    Pour l'heure, je me tiens à l'ombre d'un bananier, éventé par les larges palmes poussiéreuses de l'herbe géante qui se balancent avec mollesse au souffle des vents. Je sirote des boissons sucrées sans goût, sinon celui de la fraîcheur. Je suis au cœur du continent du don et contre-don. Je médite sur l'impermanence des choses et j'observe le ciel africain immense, au vol si haut des oiseaux et aux nuages amples. Un homme passe dans la ruelle, transportant sur la tête une machine à coudre de la marque Eléphant, les lettres sont effacées. Il joue avec une paire de ciseaux pour rythmer ses pas. Les Africains sont emplis de cet amour jamais perdu qui donne à leur démarche de l'assurance qui peut parfois passer pour de l'arrogance. Cette force tranquille tient tout leur corps pareil aux arbres plantés dans la savane avec leurs branches lourdes jamais écrasantes, ouvertes au-dessus des troncs pleins.


    Dehors les enfants jouent dans les détritus et les femmes aux seins nus se baignent dans le marigot. La dolotière, vêtue d'un pagne vert, m'entraîne derrière elle. C'est une femme robuste, massive sans être lourde. Sa démarche a le même velouté que ses rondeurs. Elle s'arrête et parle longuement au joueur de balafon qui se tient seul dans sa cour. Leur conversation semble importante. Quelle affaire peuvent-ils régler ? Une soirée de musique chez la dolotière ? Ils parlent tous deux en mossi et moi je regarde le ciel s'étirer en longues volutes blanches et rouges. La dolotière reprend sa démarche chaloupée et nous passons devant la cour du tisseur et de son fils, silencieux, qui passent et repassent leur navette en bois entre les fils colorés tendus par une pierre comme une toile d'araignée. A côté d'eux se tient une jeune mère qui allaite son enfant. La chaleur -est-ce le vent ?- se fait oublier et l'orage est pourtant lointain. La dolotière salue le tisseur et son fils et me fait signe de la suivre. Je l'accompagne jusqu'à sa cour où jouent deux enfants très jeunes. L'un deux porte à son cou une boîte de conserve. Il l'a accroché à une ficelle et l'a tendue d'une peau qui transforme la boîte en tam-tam. A mon approche, le petit se cache derrière sa soeur plus grande d'une tête. 
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    Je me souviens d'un autre hiver passé dans une ville d'Europe. C'était avant mon départ pour l'Afrique. A cette époque je vivais dans un appartement spacieux en bordure d'un fleuve. L'appartement fané ressemblait à un vieil hôtel vénitien, le charme en moins, la crasse en plus.

     

      

      

    à suivre


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