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    Je ne sais à quel moment l'instant devient magique, à quel moment le regard et la caresse, le silence et le baiser deviennent abandon. Je sais qu'à certains moments les regards, les caresses, les silences et les baisers n'ont que l'apparence de ceux-là et leur réalité -parce que sans la profondeur tourmentée et impétueuse des échos d'autrefois- a le goût de cendre et de sable dans les bouches assoiffées. Je suis ce corps de sable qui a oublié le goût de la pluie, quand la terre rouge assoiffée, se tend dans les chemins, s'évapore en nuage de poussière jusqu'au jour où le nuage en caresse dépose son eau longtemps gardée. Et mille gouttelettes roulent et s'épuisent jusqu'au cœur de la terre rassasiée. Retrouverai-je jamais ce goût d'autrefois quand le nuage en reflet se pose dans l'œil de la terre ? Cela a a existé, cela a été bu et cela a rassasié.

    Ce moment se reconnaît aussi par ce qu'il a de violent. Dans ce partage, aucune moitié ne savoure à demi le bon ou l'amer. La coupe bue est tantôt de l'acide, tantôt de l'ambroisie et les amants le savent bien qui se tordent dans les convulsions du plaisir : l'arc et la flèche. Dans ce moment l'union est puissante comme l'orage. La terre ne vibre qu'à cette unique condition. Au cœur de l'été, dan la chaleur la plus lourde, l'apaisement ne vient qu'après le terrible assaut du ciel à la terre. Quand la pluie finement redonne à la terre son goût de fraicheur l'apaisement vient. Le ciel à la terre, enfin unis dans l'instant de la pluie, s'endorment doucement, sous la protection des nuages.

    Alors, les oiseaux et les insectes, d'un commun accord, se taisent respectueux de ces deux forces qui s'attirent avec la violence de la passion. L'âme humaine a cette même exigence pour connaître le vrai repos.


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    ou bien

    J'ai ôté une à une les pelures
    Sous la dernière est apparue
    Dans un murmure
    Ce cœur inaltérable qui bat ténu
    Tu es ma fêlure
    Un seul murmure

     

    ou bien


    Coquillage immobile
    Un homme assis s'abandonne
    Le monde murmure
    Oublieux de sa déchirure
    Il reconnaît sous les fêlures
    Sa part intacte
    Ressurgie dans le miroir du temps


    Les peaux de mémoire
    Sont tombées une à une
    Pour que batte le cœur inaltérable
    Il s'agenouille en communion
    Sa joie l'inonde
    Ses pas résonnent sur la voie
    Fragile de la certitude.

     

     

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    J'ai longtemps longé les fleuves intranquilles,
    j'ai marché dans les pas d'une silencieuse sirène
    j'ai guetté les reflets ondoyants d'un narcisse
    les harpies insatiables ont lacéré mon dos
    mes histoires ont flambé à la grande h
    j'ai plongé dans le fleuve de l'oubli
    je ne suis pas parvenu à t'oublier
    j'ai remonté le fleuve
    jusqu'à ta main tendue.


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    Les lettres se décrochent
    Les mots me délaissent.
    J'entends à peine le chant des sirènes
    Mes liens se détachent
    Les mâts se rompent
    Je sors de l'eau
    Mes pieds nus
    Chaudement découvrent
    Le sable.
    J'abandonne mon univers fluide
    Pour ses domaines harmoniques
    Je ne crains pas de me perdre
    Je rejoins ses certitudes
    Ses errances escarpées.
    Je les ai reçues en don
    Au pied de nos lits veloutés
    La houle chuchotante de mes matins
    Se brise à sa triomphale exaltation.


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    Les jours d'après l'illusion s'enfoncent en sillon articulé d'un champ labouré. La pensée chemine dans cette ornière de glaise. L'angoisse flottante griffe le cœur de ses caresses creuses.

    Dieu en son lointain, l'œil morne, l'œil noir, l'œil désir, souffle de brume les paysages harmonieux, borde d'écume la mer en furie, alanguit les corps des amants délaissés.

    Au pied des arbres l'eau monte pareille aux tourments de l'âme. Les lumières jaunissent derrière les fenêtres fermées. Le voyage dans l'immatérialité commence. Les veines bleues s'étendent en paysages uniques. De l'ongle rose s'écoule l'humide inquiétude. La cerne bleue se pose dans le ciel. Les ciels se nuancent de gris et les touches bleu pâle se mêlent à la brillance des nappes blanches. Le cœur se ferme dans le poing.

    Un homme lit dans une rue une liste de mots en langue étrangère, alignés sans ordre apparent. En sanglots silencieux, l'enfant dévoré court jusqu'à l'orée de l'épaisse forêt.


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